# 3 // Temple Bar

Si vous passez par les Royal Courts of Justice et que vous avez un moment à perdre, arrêtez-vous devant le Temple Bar Memorial.
C’est le monument qui se trouve au milieu de la rue, et marque la frontière entre la Cité de Londres et la Cité de Westminster, et donc entre Fleet Street et le Strand.
Au Moyen Âge, la Cité de Londres avait étendu sa juridiction au-delà des murs de l’antique Londinium et avait installé des portes dans les anciens faubourgs, afin de contrôler les personnes et les biens qui entraient et sortaient. Parfois, il s’agissait de simples barrières et on a conservé le nom de bars, comme on parle d’ailleurs des barrières de l’octroi à Paris. Ici, on parlait de Temple Bar, puisqu’elle jouxtait le domaine des Templiers et, aujourd’hui encore, Temple Church et les corporations judiciaires que sont Inner Temple et Middle Temple.
C’était l’entrée la plus prestigieuse de la Cité de Londres, puisqu’elle se trouvait sur la route processionnelle qui reliait Londres à Westminster. Ainsi, pendant plusieurs siècles, il était d’usage que le souverain passe la nuit précédant son couronnement à la Tour de Londres, puis se rende à l’Abbaye de Westminster avec tout le faste de la monarchie anglaise. Selon une autre tradition, le souverain, lorsqu’il venait visiter la Cité de Londres, était accueilli à Temple Bar par les représentants de la Corporation de Londres. Une légende prétend que le roi ou la reine devait attendre l’autorisation du Lord Maire, ce qui est bien sûr totalement faux. En revanche, le Lord Maire devait présenter au monarque l’Epée d’Etat (« Sword of State »), en signe de loyauté.
Dans le cadre des travaux d’embellissement qui firent suite au Grand Incendie de 1666, Charles II demanda à Sir Christopher Wren d’édifier une porte monumentale à Temple Bar. Temple Bar Gate fut édifiée entre 1669 et 1672. La construction, de style baroque, présentait des statues de Charles II et de son père, le roi décapité Charles Ier, du côté de Westminster, et des statues de ses grands-parents, Jacques Ier et Anne de Danemark, du côté de la Cité de Londres. Deux siècles plus tard, la porte de Wren était devenue un obstacle pour la circulation. Sur ordre de la Corporation de la Cité de Londres, elle fut donc démontée en 1878. Onze jours furent nécessaire pour dissocier les 2 700 blocs de pierre. Après avoir appartenus à différents propriétaires privés, ils furent rachetés par le Temple Bar Trust et remonté au pied de la cathédrale Saint-Paul, pour servir d’entrée à Paternoster Square. Depuis le 10 novembre 2004, on peut donc à nouveau admirer la somptueuse Temple Bar Gate de Christopher Wren.
Quant à la frontière entre les cités de Londres et de Westminster, elle fut marquée dès 1880 par le Temple Bar Memorial, le monument dont nous parlions au début de cet article. Le piédestal, orné des attributs des arts, des sciences, de la navigation et autres réalisations humaines, présente deux statues en bronze de la reine Victoria et de son fils, alors prince de Galles. Cela rappelle que la souveraine a été la dernière à franchir Temple Bar Gate, en 1872, lorsque la famille royale était venue assister à un service d’action de grâce à la cathédrale Saint-Paul, pour célébrer la guérison du futur Edouard VII, après une grave attaque de fièvre typhoïde. La scène est d’ailleurs représentée sur un des bas-reliefs. Au sommet, un dragon, l’un des emblèmes héraldiques de la cité de Londres, semble protéger la ville. C’est l’un des treize dragons qui, depuis la fin des années 1960, marquent quelques-unes des entrées de la Cité de Londres. Les deux dragons de Victoria Embankment sont plus anciens puisqu’ils ornaient le vieux Coal Exchange dès 1849. Les onze autres sont des versions réduites de ces derniers, fondues dans les années 1960.

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