Bacchanale devant un terme de Pan, par Nicolas Poussin
National Gallery
par Francesca Withlum-Cooper
The Myojin-Nadar Associate Curator of Paintings 1600-1800

Nicolas Poussin, A Bacchanalian Revel before a Term, 1632-3. Oil on canvas, 98 x 142.8 cm. Bought, 1826. NG62. 2021 © Copyright The National Gallery, London .
Le texte original, en anglais, est disponible ici.
Nicolas Poussin (1594-1665) est le plus important des peintres français avant Manet et les Impressionnistes. Connu comme le Père du classicisme français, son œuvre a inspiré des générations d’artistes, de Jacques-Louis David, à l’époque de la Révolution, à Piccaso, Matisse et Francis Bacon au XXe siècle, en passant par Cézanne au XIXe. Malgré l’influence de son art, Poussin est souvent perçu comme plutôt froid et austère, un peintre purement intellectuel. Poussin et la Danse, l’exposition présentée à la National Gallery jusqu’au 2 janvier 2022, cherche à renverser cette perception.
En arrivant à Rome en 1624, Poussin a rapidement répondu aux grandes œuvres de l’Antiquité et de la Renaissance qu’il y découvre. Les danses et les célébrations de l’Ancien monde l’ont grandement inspiré, les satyres dansants et les nymphes extatiques devenant les sujets de ses tableaux. Avec son mouvement joyeux et chaleureux, Bacchanale devant un terme de Pan (A Bacchanalian Revel before a Term) (1632-1633) incarne ce moment dans la carrière de Poussin.
Dans une clairière, un groupe de fêtards tourbillonne devant une statue de Pan, le dieu romain des bergers, des forêts et des comportements sauvages. Ce groupe paraît effectivement un peu sauvage : l’un des danseurs est nu, les autres à peine vêtu d’étoffes qui volent au gré de leurs mouvements. Notre œil suit les danseurs sur la toile, depuis la nymphe qui presse une grappe de raison au-dessus de la coupe des putti, en bas à gauche, suivie par la ronde méticuleusement chorégraphiée du groupe central, pour finir sur la nymphe et le satyre amoureux, renversés, en bas à droite, par la vigueur de la danse et la force du vin. À l’arrière-plan, un putto boit effrontément le vin d’un grand vase, tandis que l’autre, qui en a abusé, s’est endormi, ivre, sur le sol.
Malgré le caractère sauvage de son sujet, la danse de Poussin est extrêmement précise. Regardez comment les orteils de la nymphe qui presse la grappe de raisin croise la fesse du putto endormi, ou la manière dont le pied levé du faune vêtu de jaune est aligné avec la jambe de la nymphe. Il est probable que Poussin a modelé ces personnages en trois dimensions au cours de son processus de création : nous savons par des personnes ayant visité son atelier qu’il avait fait des petits modèles en cire, à qui il pouvait donner différentes poses. Il capturait cet « instantané » de mouvement pour l’utiliser dans sa composition. Les draperies vaporeuses et l’arrangement des personnages comme dans une frise rappellent les bas-reliefs que Poussin a étudié à Rome. Dans des peintures comme cette Bacchanale, il tend à égaler la beauté de ces marbres anciens, dans la peinture à l’huile.