NAPOLEON

Introduction

par Thomas Ménard
historien de formation,
porteur du projet

Je dois avouer que je ne m’étais jamais vraiment intéressé à Napoléon Ier, même s’il arrive toujours en tête dans la liste des personnages historiques préférés des Français et si j’ai étudié dans le même lycée que lui (Napoléon y resta quelques mois, Joseph presque cinq ans et Lucien près de deux ans). J’avais sans doute même plus de sympathie pour Napoléon III, d’abord parce qu’il était plus sympathique (je crois), ensuite parce qu’il était mort à quelques kilomètres de l’endroit où j’habitais à Londres. Ensuite, j’ai commencé à m’intéresser aux deux Empires à travers les expositions et ouvrages qui évoquaient les résidences des deux empereurs et la vie de cour à laquelle elles servaient de cadre, puisque c’était le domaine de l’histoire dans lequel je m’étais spécialisé à l’université.

Lorsque j’ai entendu parler des commémorations du bicentenaire de la mort de l’Empereur, il m’a semblé évident que ce devait être le premier projet porté par la Fondation culturelle francophone de Londres. Il est certain que Napoléon Ier a laissé une marque indélébile dans la mémoire des Britanniques, dans leur paysage, notamment à Londres (Trafalgar Square, Waterloo Station), mais surtout dans les collections de leurs institutions culturelles, qu’elles soient grandes ou petites.

J’ai aussi réfléchi sur le personnage, en laissant de coté mes préjugés. Je me suis surtout demandé si cela avait encore un sens, deux siècles après sa mort, d’aimer ou de ne pas aimer Napoléon. On peut sans doute admirer son œuvre ou la critiquer, se dire qu’il nous faudrait un homme comme lui aujourd’hui ou au contraire se réjouir qu’il n’y en ait plus. Mais est-ce qu’il est rationnel d’avoir une relation affective, positive ou négative, avec un personnage historique qui n’existe plus, justement, que dans les livres d’histoire et les collections des musées ? Est-ce qu’il est raisonnable de vouloir replacer le produit d’une époque et de circonstances particulières à une autre époque et dans d’autres circonstances ?

Le propos de ces activités napoléoniennes de la Fondation culturelle francophone de Londres n’est donc absolument pas affective, et surtout pas politique. Il ne s’agit pas de glorifier l’Empereur ou de le dénigrer. Mais simplement de voir quelle place il a laissé dans le paysage londonien et dans les collections des grandes institutions culturelles britanniques. De rappeler quelques événements historiques : des guerres, des batailles, des victoires pour les uns, des défaites pour les autres, et inversement, des alliances, des trahisons, des traités… Et puis d’évoquer des objets qui rappellent ces événements du passé : des tableaux, des statues, des armes, des documents d’archives, des vêtements, des objets d’art et des objets du quotidien. Mais surtout de se souvenir d’ hommes et de femmes, qui ont eu un lien avec le jeune Napoleone, avec le général Bonaparte, avec le Premier consul ou avec l’Empereur Napoléon Ier, au temps de sa gloire ou au temps de son exil. Ces hommes et ces femmes sont ceux qui reposent à l’abbaye de Westminster, qui figurent sur les tableaux des musées, qui ont commandé, acheté, collectionné, utilisé tel ou tel objet commémorant l’Empereur ou ses défaites, ou lui ayant appartenus. Certains sont connus, d’autres sont oubliés.

Il ne faut pas s’imaginer que tous ces souvenirs sont négatifs, de ce côté de la Manche. Charles James Fox, un des plus grands orateurs britanniques, était un grand admirateur de Napoléon et l’a rencontré plusieurs fois à Paris, au temps de la Paix d’Amiens. Wellington était son ennemi acharné mais il le respectait et, dit-on, lui aurait même sauvé la vie à plusieurs reprises. Quand Wellesley collectionnait les souvenirs de Napoléon, il ne s’agissait pas simplement de prises de guerre, mais une manière de marquer son respect pour le glorieux général. Il est évident, aussi, que la gloire du vaincu rejaillit sur les vainqueurs. Cela explique sans doute pourquoi la « Napoleonmania » n’a cessé d’exister au Royaume-Uni, en Russie ou même en Allemagne, sans doute plus qu’en France, d’ailleurs, où le sujet reste bêtement politisé. N’oublions pas aussi que Londres et le Royaume-Uni furent une terre d’accueil pour de nombreux Bonaparte après la chute de l’Aigle (et même avant, puisque Lucien y vécut entre 1809 et 1814). C’est là que s’éteignit Napoléon III et qu’il repose toujours, aux côtés de l’impératrice Eugénie et du Prince Impérial. C’est là que vit l’actuel Prince Napoléon.

Ces lieux, ces événements, ces objets, ces hommes et ces femmes, vous pourrez les retrouver à travers une série de Parcours Napoléon à Londres et dans les collections des grandes institutions culturelles britanniques.
Certains de ces parcours prendront la forme de contenu en ligne. Par exemple, le « Parcours Napoléon dans les collections royales » n’aura pas d’unité géographique : nous évoquerons des objets présentés au palais de Buckingham, au château de Windsor ou dans d’autres résidences royales, et parfois en prêt dans des musées.
D’autres parcours pourront être suivis in situ, sur votre téléphone ou en imprimant les fichiers disponibles sur notre site, en tout cas dès lors que les conditions sanitaires le permettront. Ce sera le cas pour le « Parcours Napoléon à l’abbaye de Westminster » ou le « Parcours Napoléon dans la Waterloo Chamber du château de Windsor ».
Ils seront aussi l’occasion de découvrir des objets qui ne sont pas exposés au public, et donc parfois inédits.

Ils seront le « complément anglais » (mais en langue française) des nombreux livres et articles de presse, expositions et conférences, émissions de télévision ou de radio, cérémonies officiels et, sans doute aussi, débats de comptoirs qui marqueront cette Année Napoléon, en France et ailleurs.

Janvier 2021

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