Le British Napoleonic Bicentenary Trust

Dès que la Fondation culturelle francophone de Londres a envisagé de travailler sur la place laissée par Napoléon au Royaume-Uni, le British Napoleonic Bicentenary Trust a accepté de soutenir ce projet. Qu’il en soit encore une fois vivement remercié.
Le Trust, organisme de charité fondé par le gouvernement de Sainte-Hélène, a le privilège d’être placé sous le haut-patronage de Son Altesse Royale le duc de Gloucester et de Jean-Christophe, Prince Napoléon. Aux côtés de la Fondation culturelle francophone de Londres, il est partenaire de l’Année Napoléon 2021, coordonnée en France par la Fondation Napoléon.
James Bramble, directeur exécutif du Trust, a accepté de répondre à quelques questions sur Sainte-Hélène, le Trust et ses objectifs.

www.napoleon200.org


Propos recueillis et traduits par Thomas Ménard. La version originale est disponible ici.

Tout d’abord, James, pourriez-vous nous rappeler où se trouve Sainte-Hélène ?
Au milieu de l’Atlantique ! Sainte-Hélène se situe à environ 2000 kilomètres à l’Ouest de l’Angola. C’est l’un des endroits les plus reculés du monde, à plus de 1000 kilomètres du premier endroit habité, l’île de l’Ascension.

Quand Napoléon est mort le 5 mai 1821, c’était une possession de la Compagnie britannique des Indes orientales. A quoi servait cette île ?
C’était surtout un avant-poste stratégique et un point de ravitaillement. En 1659, lorsqu’elle a pris conscience de la valeur stratégique de l’île, la Compagnie anglaise des Indes orientales a décidé d’y installer une colonie, sous le commandement du capitaine John Dutton. Les Hollandais avaient eu la même idée et ont envahi l’île, mais la Compagnie s’en est emparée à nouveau.

Pourquoi le gouvernement britannique a-t-il décidé d’y exiler Napoléon ?
Dès le milieu du XVIIIe siècle, Sainte-Hélène était une véritable place-forte et, quand Napoléon vivait en exil à l’île d’Elbe, on l’avait déjà envisagée comme un endroit possible pour l’éloigner. Les puissances européennes étaient très nerveuses – littéralement – à l’idée qu’il était si proche. Après les Cent Jours et la défaite de Napoléon à Waterloo, la décision de l’y envoyer a été prise incroyablement vite : à peine deux mois après sa défaite à Waterloo, il était déjà en route pour Sainte-Hélène.

C’est désormais un Territoire britannique d’Outre-mer. Qu’est-ce que cela signifie ?
Cela signifie surtout que c’est un territoire avec son propre gouvernement. La reine est le chef d’Etat et, bien sûr, le Royaume-Uni assure son financement et sa protection, mais l’île dispose de son propre gouvernement, de sa monnaie, de ses tribunaux, etc. La Couronne est représentée par un gouverneur, mais l’île est gouvernée par des conseilleurs élus.

Vous êtes le directeur exécutif du British Napoleonic Bicentenary Trust, un organisme de charité fondé par le gouvernement de Sainte-Hélène il y a quelques années. Quel est son objet ?
Le Trust a deux missions : d’une part, préserver le patrimoine bâti de Sainte-Hélène, notamment, bien sûr, celui qui est étroitement lié à la période de l’emprisonnement de Napoléon ; d’autre part, développer de nouvelles perspectives sur l’histoire de Napoléon à Sainte-Hélène. En cela, il faut comprendre les histoires des gens qui vivaient à Sainte-Hélène à cette époque, aussi bien que celle de Napoléon lui-même.

Longwood Old House, les Briars et la Vallée du tombeau appartiennent désormais à la France. Y a-t-il d’autres édifices historiques qui rappellent la présence de Napoléon à Sainte-Hélène ?
Les sites placés sous la responsabilité des autorités françaises sont en excellente condition, en grande partie grâce aux efforts du consul honoraire de France, Michel Dancoisne-Martineau. A côte de cela, il y a une multitude d’infrastructures civiles ou militaires qui sont également à la merci des éléments. En ce moment, nous nous intéressons à la cabane de Toby (Toby’s Cottage), une petite maison du domaine des Briars, où Napoléon a vécu avant de s’installer à Longwood. On sait qu’un esclave, Toby, vivait ici et qu’il s’est entretenu avec Napoléon. En protégeant ce site, nous pouvons mettre en lumière un aspect particulier de l’histoire de Napoléon à Sainte-Hélène, ainsi que la question de la vie des esclaves de l’île à cette époque. Nous voulons aussi préserver quelques-unes des magnifiques fortifications de l’île, comme Munden’s Battery ou Banks Battery, mais tout est lié à la possibilité de financement.

Quel genre d’activités avez-vous organisé dans le cadre du bicentenaire ?
Nous avons bien sûr dû faire face à des défis certains du fait de la pandémie de Covid et nous avons été contraint de revoir nos grand projets pour un événement le 5 mai. A la place, nous avons organisé une série de six événements en ligne, un par mois jusqu’en mai, qui nous ont permis d’explorer l’histoire de l’île sous différents angles. Ils sont toujours disponibles [en anglais] sur notre site. Le 4 mai, nous avons publié une série de courtes séquences vidéos, avec des bénévoles en costumes qui jouaient le rôle de personnes ayant vécu à Sainte-Hélène dans les dernières années de la vie de Napoléon, et qui avaient des vues très différentes sur lui et sur le traitement qu’on lui imposait. Finalement, le 5 mai, nous avons retransmis en direct les cérémonies qui se sont déroulées sur l’île, ce qui a été possible puisqu’il n’y a eu heureusement aucun cas de Covid à Sainte-Hélène.

Vous aviez également prévu une cérémonie au cimetière de Kensal Green, à Londres. Pour quelles raisons ? Qu’aviez-vous programmé ?
A Kensal Green, nous devions avoir une cérémonie au cours de laquelle des plaques commémoratives devaient être posées sur les tombes des nombreuses personnes que j’ai déjà évoquées, notamment Betsy Balcombe, l’adolescente qui avait noué une amitié avec Napoléon, ou Gideon Gorrequer, qui a laissé un journal très acide à propos des événements qui se sont déroulés sur l’île. Il se trouve que beaucoup d’entre eux ont été inhumés à Kensal Green Cemetery, puisque c’était l’endroit à la mode où il fallait être enterré à cette époque. Du coup, nous avons simplement installé les plaques et vous pouvez les découvrir dans quelques-unes des séquences vidéos dont je vous ai parlé.

Vous êtes Britannique, James. Que représente Napoléon pour le peuple britannique à notre époque ?
Je pense que Napoléon a toujours représenté la possibilité de décider de son propre destin et de réaliser de « grandes » choses. Naturellement, il y a beaucoup de gens aujourd’hui, y compris en France, qui se demandent à quel point ces choses étaient « grandes ». Le Trust n’a aucune position sur ce sujet. Nous souhaitons simplement ouvrir la discussion et faire découvrir à plus de gens l’histoire particulièrement fascinante de Napoléon à Sainte-Hélène. C’est aussi une manière d’évoquer certaines des polémiques autour de Napoléon, notamment à propos de l’esclavage. Surtout, je voudrais m’affranchir de l’idée d’une « perspective française » ou d’une « perspective britannique ». Tout cela s’est déroulé il y a 200 ans et nous devrions être capable, désormais, de regarder ces événements et cet homme de manière objective.

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